« Voila ce que c'est mon vieux Joseph! » Quand Dieu intervient dans nos vies, il surprend, bouscule, dérange. Ses projets de sont pas les nôtres, ses vues ne sont pas toujours à la portée de nos lunettes.

Homélie 4e dimanche de l’Avent. 22 décembre 2019. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

Voilà c’que c’est, mon vieux Joseph
Que d’avoir pris la plus jolie
Parmi les filles de Galilée
Celle qu’on appelait Marie

Tu aurais pu, mon vieux Joseph
Prendre Sarah ou Deborah
Et rien ne serait arrivé
Mais tu as préféré Marie

Tu aurais pu, mon vieux Joseph
Rester chez toi tailler ton bois
Plutôt que d’aller t’exiler
Et te cacher avec Marie

Tu aurais pu, mon vieux Joseph
Faire des petits avec Marie
Et leur apprendre ton métier
Comme ton père te l’avait appris

Pourquoi a-t-il fallu, Joseph
Que ton enfant cet innocent
Ait eu ces étranges idées
Qui ont tant fait pleurer Marie

Parfois je pense à toi, Joseph
Mon pauvre ami lorsque l’on rit
De toi qui n’avais demandé
Qu’à vivre heureux avec Marie

Vous avez peut-être reconnu le texte de la chanson de Georges Moustaki, écrite en hommage à Joseph. Elle m’est revenue comme en écho à la lecture de l’Evangile que nous venons d’entendre en ce quatrième dimanche de l’Avent.

A quelques jours de la fête de la Nativité, l’Evangéliste Matthieu nous donne justement de méditer sur la personne de Joseph, son parcours de foi, sa place dans l’histoire du salut. A ce propos, le Pape Benoit XVI affirmait dans une homélie au jour de la fête de saint Joseph que « la figure de ce grand saint, tout en restant plutôt cachée, revêt dans l’histoire du salut une importance fondamentale ». De son coté le Pape François souligne que Saint Joseph est « l’homme fidèle et juste qui a préféré croire au Seigneur plutôt que d’écouter les voix du doute et de l’orgueil humain ».

« Voilà c’que c’est mon vieux Joseph ! »  Lorsque Dieu fait irruption dans nos vies, lorsque sa voix trouve une oreille, et qui plus est, un cœur accueillant et disponible, l’impossible devient alors possible. Le cours de l’histoire prend couleur d éternité, le temps de Dieu devient le temps des hommes, le temps des hommes celui de Dieu. Il aura bel et bien fallu, et le Oui de Marie, et le Oui de Joseph pour que Dieu trouve berceau en notre humanité.

Quel chemin intérieur a du faire Joseph, face aux événements qui se présentaient à lui ! La perspective du mariage avec la toute jeune fille Marie a tourné court très vite! La joie de la noce tant attendue a fait place à l’amertume d’un cœur chaviré devant la réalité de ce qui paraissait être une infidélité. Marie était enceinte.                     

Joseph, nous dit l’Evangile, homme juste et bon et certainement parce que profondément amoureux et respectueux de Marie, décida de ne pas la dénoncer publiquement comme le préconisait la loi en vigueur, mais plutôt de la renvoyer en secret. Il ne voulait pas exposer Marie à la disgrâce publique. On pourrait dire que, comme le fera plus tard son fils adoptif, Joseph prend ici quelque recul vis à vis de lois parfois dures et rigides, non respectueuses de l’homme et de son histoire. La tendresse et l’amour sont au cœur de sa décision.

Aux heures d épreuves, devant des projets humains qui se voient entravés, face à des relations humaines difficiles, de décisions à prendre, l’attitude de Joseph nous interpelle. De quelle manière agissons-nous ?  Que privilégions-nous ?

« Voila ce que c’est mon vieux Joseph ! »  Quand Dieu intervient dans nos vies, il surprend, bouscule, dérange. Ses projets de sont pas les nôtres, ses vues ne sont pas toujours à la portée de nos lunettes.

Surprise, Marie avait accueilli le message de l ‘Ange Gabriel lui annonçant qu’elle serait la mère du Sauveur. « Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils, la force de l’Esprit Saint te couvrira de son ombre ». Sans tout comprendre, de sa bouche et de son cœur a jailli le Oui de la Foi, de la disponibilité : « Je suis la servante du Seigneur que tout m’advienne selon sa Parole ». 

A son tour, Joseph, reçoit en songe la visite de l ‘Ange, lui annonçant l’inattendu, on pourrait dire le « non recevable ». « L’enfant que porte Marie est fruit de l’Esprit Saint. Tu lui donneras le nom de Jésus, c’est à dire le Seigneur sauve. »  Aussi « Ne crains pas de prendre Marie chez toi », elle est ton épouse. Docile à la voix du messager de Dieu, parce qu’il est un homme de foi, Joseph revient sur sa décision première. Il ne répudiera pas Marie. Il se fait humble et accepte la mission que Dieu lui confie. Joseph est un homme juste, un homme de Foi. Il vit une véritable conversion, se dépouillant de ses vues, pour s’abandonner à Dieu et à ses desseins. Il accepte de faire de sa vie avec Marie et l’enfant qui va naître, une histoire inouïe et sacrée, ancrée dans leur amour et dans la confiance totale en Dieu et en sa Parole.

Quand nous répondons Oui à ce que Dieu attend de nous, quand nous osons des pas dans la foi sans tout mesurer, sans tout comprendre et maîtriser, nous sommes alors, comme Joseph, sur un chemin de conversion. Nous passons de nos désirs, de nos projets parfois étroits, aux vastes infinies des projets de Dieu sur nous mêmes et sur l ‘humanité. Joseph s’est montré un authentique héritier de la foi d’Abraham : foi dans le Dieu qui conduit les événements de l’histoire selon son mystérieux dessein de salut. « Sa grandeur, comme celle de Marie ressort d’autant plus parce que sa mission s’est accomplie dans l’humilité et la vie cachée de la maison de Nazareth »

Joseph homme juste, homme de foi et d’abandon à la volonté de Dieu nous interpelle sur nos propres capacités d’ouverture à Dieu, à sa Parole, à ses projets. Qu’en est-il pour nous dans nos vies ? Avec lui, Joseph nous engage sur un chemin de conversion.

« Voilà ce que c’est mon vieux Joseph, toi qui n’avais demandé qu’à vivre heureux avec Marie ». Heureux avec Marie, Joseph l’a été ! Non pas que, comme tout couple et parent, ils n’aient pas connu de soucis, d’inquiétudes, d’épreuves ; les Evangiles en témoignent. Mais leur bonheur c’est celui d’avoir librement, ensemble et dans l’amour, réalisé la volonté de Dieu, s’engageant et vivant son projet de Salut pour toute l’humanité. Car c’est bien leur « oui » prononcé dans leur chair et dans la foi qui a permis à Dieu de naître au cœur de notre humanité.

Frères et sœurs, « Préparons-nous donc » comme nous y invite le Pape François, « à célébrer Noël en contemplant Marie et Joseph : Marie, la femme pleine de grâce qui a eu le courage d’avoir totalement confiance dans la Parole de Dieu ; Joseph, l’homme fidèle et juste qui a préféré croire au Seigneur plutôt que d’écouter les voix du doute et de l’orgueil humain. Avec eux, marchons ensemble vers Bethléem. »