Ce n’est que ce matin en me rasant que j’ai repensé à la question que nous nous posions hier, Diane, toi et moi, au téléphone : pourquoi, en cette période de confinement avons-nous à peine le temps de mener les tâches que nous avons à faire alors qu’en temps ordinaire, nous arrivons à en faire au moins autant sur des espaces de temps plus réduits ?

Petite réflexion sur ce temps qui nous est donné en tant de confinement. Xavier de Lamartinie

Ce n’est que ce matin en me rasant que j’ai repensé à la question que nous nous posions hier, Diane, toi et moi, au téléphone : pourquoi, en cette période de confinement avons-nous à peine le temps de mener les tâches que nous avons à faire alors qu’en temps ordinaire, nous arrivons à en faire au moins autant sur des espaces de temps plus réduits ?

Je te rassure, je ne me suis pas entaillé la joue pour autant avec mon rasoir mais je me suis promis à moi-même de partir à la recherche de ce temps perdu.

Une enquête s’imposait. Il y a assurément de gros problèmes de fuites avec le temps qui s’écoule quand nous travaillons à la maison et il serait bougrement intéressant de savoir d’où elles proviennent. Oui, où pouvaient bien passer ces précieuses secondes ? Y avait-il un voleur de temps qui réduit nos journées de travail à la maison à notre insu ? En ces temps où les théories du complot font flores, démasquer le malfaiteur et redonner du temps au temps devenait à mes yeux une nécessité. Car s’il y avait un principe de relativité du temps, si celui-ci pouvait être soumis à je ne sais quelle géométrie variable, en trouver les ressorts serait bien commode, non seulement dans la situation actuelle mais également pour le futur : et oui, si le temps se rétracte ou se dilate à volonté, dans la mesure où cette volonté m’appartiens, je pourrais acquérir une grande liberté et adapter mon temps de travail plus efficacement encore que ne l’avait fait Martine Aubry en créant la semaine des 35 heures…

Et me voilà donc à me poser tout un tas de question sur le temps qui passe et qui ne repasse pas. Et, ce qui est formidable aujourd’hui, c’est que l’on a à sa disposition un formidable outil, bourré d’informations, de contre-vérités, d’intox et de mensonges qui s’appelle internet. En deux clics trois mouvements, je balançais donc, comme une bouteille à la mer, mes interrogations à la toile mondiale. La pêche fut fructueuse. Il y avait du tri à faire dans ce que j’avais ramené dans mes filets et je rejetais bien vite les théories d’Albert (Einstein, bien sûr) qui a mathématisé tout ce qu’il avait découvert sur le principe de relativité du temps : trop complexe pour ma petite tête et cela ne me donnait toujours pas l’origine des fuites en période de travail à la maison.

Et puis, je tombais alors sur du lourd. Un certain Parkinson (pas celui qui a donné son nom à une maladie) a dit une grande vérité qui est devenue loi dans la mesure où elle se révèle exact dans 99,9% des cas. Cette vérité, appelée donc « loi de Parkinson » dit tout simplement que « le travail s’étale de façon à occuper le temps disponible pour son achèvement ». Aucun voleur donc à prendre en flagrant délit. Le travail, et plus précisément la façon dont nous travaillons sont seuls fautifs dans cette affaire : si je ne me fixe pas de butée temporelle, la réalisation d’une tâche peut alors s’éterniser. Et c’est bien ce qui se passe quand je me retrouve à la maison : je suis alors « tout horaire » et démarre une tâche sans me dire à quel moment je prévois de la terminer. La solution est alors simple : il suffit de se définir un « budget temps » qu’il parait raisonnable de consacrer à une activité ou à une tâche donnée et de se fixer des échéances à ne pas dépasser. C’est ce que nous faisons de manière plus ou moins contrainte lorsque nous avons un cadre de travail défini avec des délais (deadlines, comme diraient les anglais) à ne pas dépasser ou encore des heures de rendez-vous à respecter…

Et puis, je suis également tombé sur la trace d’un certain Carlson (qui n’est pas plus l’inventeur d’une marque de bière que ne l’est un certain Corona). Ce brave Carlson a lieu aussi définit une loi : « Toute activité ou tâche interrompue sera moins efficace et prendra plus de temps que si elle était effectuée de manière continue ». Il y a là aussi matière à réflexion : toutes ces petites distractions, toutes ces sollicitations extérieures, ces pensées vagabondes que nous pouvons avoir quand nous ne sommes pas dans un vrai cadre de travail sont de vrais mangeurs de temps. Et ce temps qui nous a été dilapidé, bon gré, mal gré, ne nous est jamais restitué ! Là encore, le remède est facile. Une bonne distanciation sociale devrait permettre la mise en place des meilleures conditions pour travailler efficacement. Et quand je parle de distanciation sociale, cela inclut également mon chien Nuts qui, maintenant, je le sais, ne m’aime pas d’amour, mais ne rate pas une occasion de me le faire savoir quand même quitte à interrompre les tâches que je me suis fixées.

Grace à Parkinson et Carlson, je suis à présent rassuré : les fuites du temps peuvent être colmatées. Demain, c’est décidé, je réduits sur le papier mes horaires de travail. La question va être alors : avec tout ce temps gagné, que vais-je bien faire de mes journées ?

Bonne semaine sainte !

Xavier de Lamartinie