Après la fête de la Nativité, voici une fête plus intime : la Sainte Famille. Une fête instituée dans notre calendrier liturgique en 1921, dans un contexte où la société s’était déjà largement sécularisée et où le pape Benoît XV...

Homélie Fête de la Sainte Famille. 29 décembre 2019. Chapelle Saint Vincent de Paul – Paris

Après la fête de la Nativité, voici une fête plus intime : la Sainte Famille. Une fête instituée dans notre calendrier liturgique en 1921, dans un contexte où la société s’était déjà largement sécularisée et où le pape Benoît XV a voulu recentrer l’attention sur la famille comme première cellule sociale et cellule privilégiée d’éducation et de vie chrétienne.

La liturgie nous propose une lecture d’un passage du livre de Ben Sirac, (2è siècle avant notre ère). Dans ce passage c’est respect qui est placé comme une valeur fondamentale. C’est le respect qui construit de façon générale dans nos relations avec les autres et de façon particulière avec nos proches, dans nos familles. Respect les autres c’est (pour Ben Sirac) manifester la présence de Dieu, c’est lui rendre hommage à partir de nos relations avec les autres. Un passage attire mon attention : l’importance que le Siracide donne aux personnes âgées. Il est terrible aujourd’hui constater qu’elles sont souvent conduites dans des centres d’hébergement et très souvent abandonnées par leurs enfants, il serait bon de relire Ben Sirac et de nous rappeler les valeurs traditionnelles de respect envers les aînés quels que soient leur âge et leur état de santé.

L’apôtre Paul, donne la place principale à l’amour comme source et soutient de nos relations humaines et familiales. Et c’est le Christ des Évangiles qui nous présente le mieux le visage du Dieu-Amour. Paul, nous invite ainsi à nous revêtir de cette Amour transformé en tendresse, bonté, humilité, douceur et patience… et nous pouvons y ajouter les valeurs que nous pouvons considérer constructifs de nos relations…

Mais, il faut le dire, je ne suis pas d’accord avec Paul, quand dans les recommandations qu’il fait aux familles de son temps il annonce : « Vous les femmes, soyez soumises à votre mari; dans le Seigneur, c’est ce qui convient ». Je crois que si nous sommes fidèles au Dieu de Jésus Christ, cette recommandation est devenue caduque et obsolète, car elle ne tient pas compte de l’évolution et de l’égalité homme/femme de nos sociétés contemporaines, même si saint Paul atténue sa recommandation par la suivante : « Et vous les hommes, aimez votre femme, ne soyez pas désagréables avec elle ». Pour saint Paul, c’était novateur et révolutionnaire de demander aux hommes d’aimer leur femme, mais pour nous, ça relève du gros bon sens.

Je sais que le concept de famille nous semble un concept vague et difficile de cerner, mais il s’agit pleinement d’une réalité sociale a dimensions théologiques et christologiques :

Il faut souligner que nos familles, quelles qu’elles soient d’ailleurs, construites à l’image du Christ ou pas, sont le lieu par excellence de notre enracinement dans la vie. C’est le premier endroit de notre socialisation, c’est-à-dire de notre manière de nous insérer dans un groupe humain. « Nous y découvrons des valeurs, des codes de conduite, parfois aussi des contradictions. C’est en elles que nous faisons également l’expérience de nos premières frustrations de désirs non assouvis. Mais pardessus-tout, les familles sont le lieu où se construit chaque être humain par les mots de tendresse et de douceur. La famille est le lieu par excellence d’apprentissage de l’amour. Aux yeux de Dieu, nous ne sommes pas des étrangers les uns pour les autres. Nous sommes ses enfants appartenant à une même famille, sa famille ».

La fête de la sainte Famille, pour moi, n’est pas la promulgation d’un modelé unique, sous la forme idyllique de la famille de Nazareth… parce qu’elle-même a traversé aussi des situations fortement humaines comme l’exile, le doute, l’incompréhension…

Il nous faut relire attentivement l’exhortation apostolique Amoris lætitia pour nous rendre compte que la famille n’est pas un patrimoine unique de l’Église mais qu’elle a une importance capitale pour la construction de la société : « Fidèles à l’enseignement du Christ, nous regardons la réalité de la famille aujourd’hui dans toute sa complexité, avec ses lumières et ses ombres […]. Le changement anthropologique et culturel influence aujourd’hui tous les aspects de la vie et requiert une approche analytique et diversifiée ».

La famille « chrétienne s’exprime dans sa diversité humaine : famille traditionnelle, famille reconstituée, famille monoparentale, et on peut ajouter aujourd’hui : famille homosexuelle…

On peut bien refuser de reconnaître certains types de familles, mais on ne pourra jamais empêcher leur existence; toutes ces familles font partie de notre réalité d’aujourd’hui. Aucune ne doit être idéalisée, car aucune n’est parfaite. En revanche, aucune, non plus, ne doit être exclue ou condamnée, car toutes peuvent porter le Christ au monde et peuvent en témoigner.

En cette fête de la Sainte Famille, invitons toutes nos familles, quelles qu’elles soient, au respect entre les générations, à revêtir nos cœurs de tendresse, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience, de pardon et d’Amour mutuel, comme le demande saint Paul, en y ajoutant toutefois l’égalité homme/femme et la réciprocité entre parents et enfants, et à la solidarité avec les hommes et les femmes blessés, rejetés, exilés, opprimés, comme l’exige l’évangéliste Matthieu.

Dans l’exhortation Apostolique nous trouvons cette prière :

Jésus, Marie et Joseph
en vous, nous contemplons la splendeur de l’amour vrai,
en toute confiance nous nous adressons à vous.

Sainte Famille de Nazareth,
fais aussi de nos familles un lieu de communion et un cénacle de prière, d’authentiques écoles de l’Évangile et de petites Églises domestiques.

Sainte Famille de Nazareth,
que plus jamais il n’y ait dans les familles des scènes de violence, d’isolement et de division ; que celui qui a été blessé ou scandalisé soit, bientôt, consolé et guéri.

Sainte Famille de Nazareth,
fais prendre conscience à tous du caractère sacré et inviolable de la famille, de sa beauté dans le projet de Dieu.

Jésus, Marie et Joseph,
Écoutez, exaucez notre prière

Amen !